Eureka, Lausanne, 1929
Définition du naïf dans le monde moderne: individu qui
soutient des idées qui ne rapportent rien.
L’esprit démocratique est un « attentat à l’intégrité
humaine ».
Cette critique rencontrera des réponses de type:
A. on ne peut pas aller contre l’époque, vous êtes un pauvre
utopiste, etc.
B. vous êtes un rétrograde, un infâme réactionnaire, etc.
1. Mes prisons
Deux angoisses dominent l’enfance: les séances chez le
dentiste et l’horaire des leçons.
La phrase sacrée: « Il faut que tous fassent la même chose
ici! »
Il faut que tous les hommes être égaux en tout pour que la
démocratie prospère et étende ses conquêtes.
L’école publique brise les ressorts de la révolte et de la
libération d’une personnalité: l’imagination, le sens de l’arbitraire et le
sens de la relativité des décrets humains. Elle apporte en échange le
conformisme.
2. Description du monstre
L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son
incompréhension méthodique des hommes et son mépris pour les paysans. Il a une
façon pédante d’être consciencieux, une façon blessante d’être supérieur, une
façon livresque d’expliquer les choses, une façon théorique de juger les êtres.
Le lieutenant-instituteur veut faire de la pédagogie avec sa
section. L’instituteur-lieutenant veut traiter militairement ses élèves.
L’école publique est impregnée par l’esprit petit-bourgeois,
qui est un véritable virus de mesquinerie.
La laideur des « collège » n’est pas accidentelle, c’est
celle-même du régime.
3. Anatomie du monstre
La manière dont se succèdent les disciplines dans l’horaire
prévient toute concentration de l’esprit.
Le bon sens voudrait que l’on tînt compte des possibilités d’adaptation
de l’enfant, de la valeur fort inégale des diverses disciplines, de la
diversité des besoins, des rythmes naturels de l’esprit humain. Au lieu de tout
cela, nous avons un arrangement identique pour tous les élèves.
A l’école, la tricherie est de règle. Les examens faussent
complètement l’esprit de l’enseignement. « Ils n’en sont pas moins devenus le
but même de l’instruction; la fin justifie les moyens et à quoi l’on subordonne
tout, plaisir, goût du travail, qualité du travail, santé, liberté, sens de la
justice et autres balivernes, instruction véritable et autres plaisanteries de
gros calibre, car à la vérité ce n’est pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de
soumettre les esprits au contrôle de l’Etat, voyons donc, - n’avez-vous pas
honte de vous faire rappeler sans cesse de vérités aussi élémentaires. »
Principe à la base du système: tous les enfants doivent à
tout instant être en mesure: d’ingurgiter la même quantité de « matière », d’en
rendre compte de la même façon, dans le même temps.
L’école exige que les meilleurs ralentissent et que les plus
faibles se forcent. Ainsi, elle assure le triomphe des médiocres.
L’école s’attaque impitoyablement aux natures d’exception,
et les réduit avec acharnement à son sens commun dénominateur.
Le bon sens voudrait qu’on étudie d’abord la science dans sa
réalité, puis qu’on se réfère au résumé (le manuel) comme à un aide-mémoire.
Mais l’école veut qu’on commence par apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’arrête
là.
Le gavage a comme conséquence qu’on ne laisse pas aux élèves
le temps qu’il faut pour assimiler ce qu’ils apprennent.
La discipline sévère fait partie de la conception
pénitentiaire de l’école.
Le fait que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge
de cinq ans favorise le développement de leurs penchants les plus « communs »:
jalousie, vanité, panurgisme, concurrence sournoise, admiration des forts en
gueule.
Il n’y a pas d’égalité réelle possible tant que la loi est
la même pour tous.
La préparation à la vie que l’ecole fournit commence par la
soustraction de l’élève à l’influence de la vie.
Le bon élève n’est ni celui qui sait utiliser pour son
profit humain la petite somme de connaissances qu’on lui donne à l’école, ni
celui qui supporte le mieux le traitement scolaire. Le bon élève est celui qui
a de bons points, le parfait imitateur. Le bon élève est aussi l’élève
discipliné.
Les principes de l’instruction publique constituent une
méthode d’abâtardissement du peuple. Ces principes dérivent nécessairement du
fait que l’école est publique, obligatoire et soumise au contrôle de l’Etat.
4. L’illusion réformiste
5. La machine à fabriquer des électeurs
L’instruction publique et la Démocratie sont sœurs
siamoises.
6. La trahison de l’instruction publique
L’école s’est vendue à des intérêts politiques.
L’école, qui soustrait l’enfant à la famille et à l’Eglise,
prétend l’éduquer.
L’école favorise le culte excessif de l’utile, l’incompréhension
brutale de la nature, la haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz
et du travail bâclé.
7. L’instruction publique contre le progrès
L’école distille le conformisme de la curiosité.
La Démocratie, par le moyen de l’instruction publique,
limite l’homme au citoyen.
L’instruction publique est la forme la plus commune de la
peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis le XVIIIe.
Suite des Méfaits (1972)
Le vieux texte n’a pas vieilli, parce que l’Ecole n’a pas
changé.
L’Etat a chargé l’Ecole de l’ensemble des attributions qui
furent naguère celles de l’Eglise, de la Morale Publique et de la Famille.
L’Ecole repose sur trois postulats:
a) Les enfants doivent allers à l’école.
b) Ils apprennent à l’école.
c) L’école est le seul endroit où ils puissent apprendre.
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