18 avril 2005

Jean Borella, Georges Vallin (1921-1983), (note de lectura)

Paru dans René Guénon, Cahiers de l’Herne, 1985.

Georges Vallin est mort le 9 août 1983, après quelques mois d’une terrible maladie.

Né à Brumath, dans le Bas-Rhin, le 1er janvier 1921. Baccalauréat de philosophie en 1939. Licence de lettres classiques (latin-grec en juin 1940, littérature française en novembre 1941). Abandonne les lettres pour la philosophie. En novembre 43 passe un Certificat de psychologie à la Sorbonne et soutient un Diplôme d’études supérieures sur l’Imagination esthétique et l’Imagination transcendentale dans la philosophie de Kant.

Agrégé en philosophie dès juin 1945. Assistant à la faculté des lettres de Nancy dès 1950. Il crée un enseignement de sanskrit à Nancy. Il quitte l’université de Nancy II pour celle de Lyon II en 1980.

L’œuvre de Georges Vallin comprend trois livres et des articles. Sa thèse principale, Etre et Individualité (P.U.F., 1959) se situe dans le prolongement de la pensée kierkegaardienne. Il a eu l’intuition des structures temporelles de la conscience moderne. “Cherchant à fonder une ontologie de l’être individuel, il lui apparut, en une longue intuition, que, relativement à cette requête, la conscience moderne – et donc l’histoire de la philosophie moderne – s’ordonnait selon trois attitudes fondamentales: une visée objectivante et cosmologique, dont la temporalité se ramène au déroulement d’un devenir purement rationnel, mais qui ignore la singularité (Aristote, Spinoza, Hegel, parmi d’autres); une visée esthétique, qui privilégie les données immédiates, le vécu intuitif, dont la temporalité se déploie entre les catégories de l’instant et celle de la durée imprévisible, où l’individu s’éprouve et se perd dans la jouissance ou la création; une visée négative enfin, dans laquelle l’individu ne se conquiert qu’en refusant aussi bien le monde objectif de la première visée que celui du vécu possessif de la deuxième. Ici, la temporalité est saisie comme le lieu de notre échec, de notre mort, de notre néant: la singularité de l’être individuel est découverte comme un vide. Cette dialectique devait conduire à un fondement de type kierkegaardien: c’est sa relation à la transcendance du Tout-Autre qui confère à la subjectivité la possibilité de se définir négativement.” (p. 412)

Dans les années 1949-1950, Georges Vallin découvre les œuvres de René Guénon, ce qui marque un changement majeur dans sa réflexion. “C’est Guénon, en effet, qui lui communiqua la doctrine de la métaphysique non dualiste, c’est-à-dire de l’Advaita-vada de Shankara. Son intelligence en fut ineffaçablement «brûlée». On peut dire que désormais son discours philosophique, écrit ou parlé, ne fut plus qu’une émanation de cette grande lumière reçue, comme s’il pensait toujours en sa présence.” (p. 412-413) La Perspective métaphysique (P.U.F., 1959) est la synthèse de sa pensée, et occupe une place unique dans la littérature philosophique de notre temps.

Sur l’homme: “Cet homme aux exceptionnelles facultés d’accueil, dont le temps fut souvent dévoré par les rencontres amicales, les entretiens avec des étudiants toujours assurés d’être entendus, cet homme ouvert à tous les courants intellectuels, esthétiques ou politiques de notre temps, même les plus «antitraditionnels», disposé à les justifier et à les accepter autant qu’il lui paraissait légitime de le faire, bref, le contraire d’un doctrinaire ou d’un dogmatique, cet homme était aussi d’une douce inflexibilité pour tout ce qui regardait l’essentiel de sa doctrine métaphysique. D’où un mélange, parfois déroutant, d’audace et de modestie.” (p. 413)

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